Conte: Le pendu dépendu
Un jour, un homme, par desespoir et aussi par auto-punition, et encore par culpabilisation, car il voulait faire de la peine a son entourage, et aussi par un signe d'appel, car il ne se sentait pas entendu, et encore par défit, pensant que tout s'arrêterait... un jour, dis-je, un homme s'était pendu.
Il fut dépendu par quelqu'un qui passait par là.
Quand il ouvrit les yeux il dit:
- C'est trop tard, vous auriez dû m'aider avant, m'aider à ne pas me prendre!
- Mais je ne vous connais pas! dis le sauveteur inconnu,
- Cela ne fait rien, vous auriez dû quand même m'aider avant!
- Je passais juste par là.
- Justement, il ne fallait pas passé.
- J'ai pensé bien faire.
- Ceux qui disaient m'aimer pensaient eux aussi bien faire... en ne faisant rien.
- Alors j'aurais dû vous laissez mourir sans intervenir?
- Non intervenir avant que je me pende, me reconnaitre, m'entendre, m'apprécier, m'aimer au besoin. Tout cela avant. Avant que mon désespour me fasse douter de tout.
- Voulez vous que je vous remette la corde autour du cou? Proposa l'inconnu.
- Surtout pas, je n'ai pas envie de mourir, j'ai besoin de parler.
- C'est que... je n'ai pas le temps, je suis pressé.
- Oui , vous aviez seulement le temps de me dépendre ou de me remettre la corde autour du cou, pas de m'écouter.
- C'est tout à fait cela. Je suis pressé de vivre, moi!
- Si un jour vous vous pendez, comptez sur moi, je ne vous décrocherai pas.
Je vais vivre avec cette idée, je sens qu'elle va me soutenir.
Il arrive ainsi à certains êtres d'avoir besoin pour survivre de s'opposer à toute tentative d'échange.
Ne croyez pas qu'il s'agit d'une histoire irréaliste. Veuillez la relire et écoutez entre les mots.
Auteur Jacques Salomé. Contes à guérir Contes à grandir. Éditions Albin Michel, 1993.